Motus et bouche cousue
- vr4429
- 11 sept. 2017
- 4 min de lecture

La loi sur la moralisation de la vie publique votée ce mois d'août instaure la peine complémentaire d'inéligibilité pour les personnes condamnées pour faits de discrimination, de provocation à la haine raciale, et pour d'autres infractions. Les députés élargissent donc les sanctions pour délits d'opinion.
Les champs notionnels de "discrimination" et de "provocation à la haine raciale" sont confus et mal délimités. La plupart du temps, ils ne peuvent donc être traités que de manière subjective. Et c'est d'ailleurs pour cela qu'ils ont été inventés, et mis en avant. Car les terrains voués à la subjectivité sont parfaits pour ancrer une idéologie, une morale. Pour que l'idéologie s'infiltre partout, il fallait donc remplacer nos cerveaux cartésiens et républicains par une bouillie subjective, composée d'ethnocentrismes, de communautarismes, de religieux, d'orientations sexuelles, de ressentiments, de culpabilités, de haines et de discriminations. Une bouillie effaçant nos repères, et d'où l'on ne pourrait faire émerger qu'une seule certitude : nous sommes les méchants. Il fallait faire de cette mixture hideuse le miroir reflétant notre image. Il fallait nous faire oublier que vivre c'est choisir, et que choisir c'est discriminer. Mission accomplie.
Deux-poids-deux-mesures et injonction au silence
Idéologie et morale sectaire peuvent donc poursuivre leur travail de sape, en poussant le bouchon toujours plus loin. Voici donc venu maintenant ce moment historique où notre droit civique d'éligibilité est mis en jeu sur des critères subjectifs, clairement idéologiques. Car avec cette loi, la jouissance de ce droit civique devient conditionnelle : pour la conserver, il faut penser, écrire et parler conforme. Certains sont plus égaux que d'autres, a écrit Georges Orwell. Nous y sommes. Le deux-poids-deux-mesures, enfanté par toute idéologie invasive et déjà pratiqué à l'envi par la bien-pensance, investit donc maintenant aussi le territoire de nos droits civiques. C'est en creux une ferme injonction au silence. Elle est envoyée aux citoyens rescapés du joug de la pensée unique qui domine au Parlement et dans la sphère oligarchique. Françaises, français, prenez garde, et taisez-vous.
Tri des éligibles et épuration de la classe politique
En revanche, cette loi liberticide donne un pouvoir accru aux associations obsédées par les discriminations, les communautés, les races, les religions, les orientations sexuelles et les genres. Chiens de garde de la pensée unique, elles sont friandes d'actions en justice pour persécuter et faire taire. Elles pourront maintenant intimider aussi par la peur de l'inéligibilité qui pourrait résulter d'une procédure qu'elles auront initiée. Les juges, quant à eux, désigneront par leurs verdicts les inéligibles. Le tri des éligibles peut donc maintenant s'effectuer très en amont, dans un deux-poids-deux-mesures parfaitement assumé, sans scrutins, sans électeurs, dans un entre-soi non élu, idéologisé, communautarisé, confessionnalisé. C'est loin, si loin du peuple, mais si politiquement correct. Quel cynisme que de glisser dans une loi rebaptisée "loi pour la confiance dans la vie politique" un outil d'épuration la classe politique !
Répression, suivisme et inconséquence
L'amendement 572 du groupe parlementaire LREM (lire en note ci-dessous) adopté par l'Assemblée Nationale vaut le détour. Ces députés prétendent défendre (je cite) "les valeurs républicaines qu'un élu se doit de partager". Mais bien au contraire, ils créent le cadre juridique pour imposer à la société leur morale idéologique en lieu et place des valeurs républicaines. Ils embastillent la liberté d'expression pour la remplacer par leur prêt-à-penser sectaire. Tellement convaincus de détenir la vérité vraie entre toutes, ils ont cédé à la tentation de la répression. Et la répression qu'ils ont choisie est celle de la privation d'un droit civique. Ça mégote pas chez ces bien-pensants autoproclamés tolérants. Ils nous livrent là, au cœur de l'été et en procédure parlementaire accélérée, un cas d'école d'ostracisme.
Champions de la discrimination, ces députés n'ont pas su voir plus loin que leur désir immature d'effacer la contradiction et de punir les présumés mal-pensants. Avec la légèreté suiviste de ceux qui ont arrêté de penser, ces esprits faibles ont donc phagocyté leur propre liberté d'expression, et mis leur propre éligibilité entre les mains des juges et des groupements de minorités activistes pour l'instant leurs alliés. Pour l'instant. Quelle courte vue ! Mais il est vrai que garder son siège à l'Assemblée, c'est du court terme. Ces élus inconséquents sapent les fondements de la République. Oublieux de la sagesse et de la prudence que réclame leur fonction, ils ont franchi avec désinvolture un seuil majeur vers un régime politique répressif.
Nathalie Rivage
4 Septembre 2017
---------------
Note :
Voir l'amendement 572 ci-dessous sur le site assemblee-nationale.fr.
ASSEMBLÉE NATIONALE
21 juillet 2017
RÉGULATION DE LA VIE PUBLIQUE - (N° 106)
AdoptÉ
AMENDEMENT No 572
présenté par Mme Forteza, Mme Moutchou, M. Ferrand et les membres du groupe La République en Marche
---------------
EXPOSÉ SOMMAIRE
Lors des travaux de la commission des lois de l’Assemblée nationale, à la peine complémentaire obligatoire d’inéligibilité figurant dans le projet du Gouvernement a été substitué un mécanisme visant à interdire aux personnes ayant été définitivement condamnées de faire acte de candidature à une élection. Afin d’éviter tout risque de censure de la part du Conseil constitutionnel, le Groupe La République En Marche dépose cet amendement, visant à réintroduire dans le projet de loi le mécanisme de peine complémentaire obligatoire, pour laquelle le Conseil d’État n’a pas identifié de risque d’inconstitutionnalité.
Toutefois, les députés du groupe majoritaire souhaitent que le principe de probité demeure une exigence pour l’exercice d’un mandat électif. C’est la raison pour laquelle, il propose cet amendement, qui reprend, dans un dispositif juridique différent, l’ensemble des infractions visées dans le texte voté en commission des lois.
Toutefois, il propose, en plus, d’étendre le champ des infractions pour lesquelles la peine complémentaire obligatoire d’inéligibilité est prévue. Ainsi, en plus des infractions les plus graves que constituent les crimes et les atteintes à la probité et à la confiance publique, le dispositif proposé concerne également les faits de discrimination, injure ou diffamation publiques, provocation à la haine raciale, sexiste ou à raison de l’orientation sexuelle qui portent atteinte aux valeurs républicaines qu’un élu se doit de partager.
Concernant les infractions à caractère sexuel, une expertise juridique est menée, afin que le dispositif comporte, comme l’a souhaité le groupe majoritaire en commission des lois, ce type d’infraction, tout en s’assurant de la consolidation juridique du dispositif.
Comments