Quand on parle d'extrême droite...
- vr4429
- 1 juin 2018
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La Gauche, pas celle de Jaurès, celle qui lui a tourné le dos, celle d’aujourd’hui, celle qui fixe le clivage entre le Bien et le Mal, qui inspecte, qui contrôle, juge, condamne, a fait de ce qui n’est qu’une simple pièce de l’échiquier politique comme toutes les autres un lieu de damnation où sont jetés tous ceux qui ne lui plaisent pas. L’Extrême Droite. L’explorateur soviétique, Dimitri Azzacov, prétendait avoir découvert l’Enfer en explorant les profondeurs de la Terre. La Gauche, elle, croit l’avoir trouvé, non pas en fouillant l’intérieur des âmes, mais en jugeant les êtres juste à leurs façons de se tenir.
L’Extrême Droite devient ainsi un lieu curieux où l’on peut trouver des gens dont les âmes ne nous semblent pourtant pas plus noires qu’ailleurs. Si l’ordre public est souvent troublé, je ne pense pas qu’il le soit à cause des quelques royalistes qui nous restent, des curés attachés à l’ancien rite, des familles catholiques de plus de six enfants, des mamans qui ont mauvaise conscience de se faire avorter, des petites filles en jupes plissées, des petits garçons en blazer bleu marine, des collégiens qui veulent apprendre, des lycéens qui ne veulent pas défiler, des étudiants qui refusent de voter à main levée, des historiens qui trouvent de belles choses à écrire sur les Rois de France, des villageois qui aiment le son du carillon, des maires qui refusent de déplacer des Croix trop voyantes. Antimilitariste, non-violente, pacifiste sur le papier, la Gauche n’a pu s’empêcher de condamner aussi à l’Enfer : la Police, par définition – sauf quand c’est elle qui lui donne des ordres – et l’Armée, par principe – sauf quand c’est elle qui lui confie des missions – Elle y a également expédié ses mauvais fils, les punis, les mis au coin, ceux qui viennent pourtant de chez elle, mais dont elle ne veut plus : penseurs, philosophes, directeurs de conscience. Les Finkielkraut, Onfray, Gauchet, qui ne connaissent plus leur catéchisme.
L’Extrême Droite a pu être aussi, au terme d’un triste épisode de l’Histoire de France – ainsi que je l’ai déjà écrit dans un précédent papier – une sorte de déchetterie dont on peut se demander si la Gauche ne l’a pas inventée elle-même, pour se débarrasser de ses encombrants et rejeter au bout de l’échiquier politique tous les hommes de sa famille qui avaient collaboré sous l’Occupation … Et il n’en a pas manqué. Quand on évoque la personne du Maréchal Philippe Pétain, l’ombre de l’Extrême Droite est toujours projetée en arrière-plan, comme pour fournir une explication et donner plus de relief encore à son comportement pendant la seconde Guerre Mondiale. En 1940, quand les deux Chambres du Parlement, classées majoritairement à Gauche, lui ont confié les pleins pouvoirs pour sortir la France du pétrin, elles les ont remis à un soldat, héros de la Grande Guerre, et non à un homme politique qui se serait distingué dans les ligues fascistes de l’époque. A l’exception du Ministère de la Guerre auquel il fut nommé en 1934 et d’un poste d’ambassadeur en Espagne, le Maréchal Pétain n’a exercé aucune responsabilité franchement marquée politiquement jusqu’en 1940. Comment un homme de 84 ans (on pourrait ajouter aujourd’hui dix années de plus, en tenant compte de l’allongement de la vie … Ce qui fait quand même 94 ans !), militaire de surcroît, aurait retrouvé un peu de sa jeunesse en se lançant dans le militantisme politique à un âge où, en règle générale, les dispositions de l’esprit se figent pour les années qui restent à vivre ? On peut lui reprocher d’avoir collaboré, pas d’en avoir eu l’idée parce qu’il était devenu, d’un coup d’un seul, un extrémiste de Droite. La chose étant totalement inimaginable sans des prédispositions physiques et intellectuelles que son vieil âge aurait effacées chez lui depuis longtemps.
La Gauche a toujours veillé religieusement, comme le ferait le curé avec ses paroissiens, à tenir pour infréquentables les gens de l’Extrême-Droite en y glissant, avec beaucoup de malice, deux familles de pensée qui n’ont rien à y faire : le Fascisme et le National Socialisme. Le premier, pour être né dans la tête d’un homme de Gauche, membre du Parti Socialiste Italien, Benito Mussolini. Le second, pour avoir muri dans l’esprit d’un autre qui n’avait rien d’un ultra conservateur, qui ne voulait rien conserver et préférait tout détruire, Adolf Hitler. Si ce dernier avait voulu restauré la tradition monarchiste allemande, il aurait rappelé Guillaume II, exilé au Pays-Bas d’où, finalement, il n’aura jamais le droit de revenir. Le vieil empereur aura même eu le temps de désavouer toutes les lois du futur chef de la nouvelle Allemagne. En voulant faire naître un homme nouveau, dans une Allemagne nouvelle, avec les moyens cruels que l’on sait, Adolf Hitler se sera plus rapproché des révolutionnaires de la Terreur que des souverains de l’ancien Royaume de France.
En fin de compte, une fois allégée de tous ceux qui n’y ont pas leur place, l’Extrême Droite devient une famille de pensée pas plus mal qu’une autre.
LUC KEROG - VPF 56
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